L'importance du copilote

Tim

PILOTE DE LIGNE
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Hello,

Cela fait effectivement pas mal de temps que je n'ai plus posté de message sur le forum, bien que j'y jette un coup d'oeil tous les jours O:) j'ai déménagé et cela a pris du temps pour régler certaines choses.

Aujourd'hui, je voudrais parler d'un récent événement auquel j'ai été confronté et qui montre les responsabilités du FO.

Jét'ais en standby (de garde) et je remarque qu'ils mont affecté du boulot pour la journée. Je reçois un appel de la compagnie qui confirme l'assignation. Jarrive dans la crewroom bien en avance pour préparer les vols de la journée. Le programme est chargé avec 4 secteurs et près de 11h de travail. Longue journée en perspective

La journée sannonce paisible avec une météo pas trop mauvaise dans son ensemble. Arrive le reporting time (l'heure ultime pour se présenter), je fais connaissance pour léquipage composé de deux stewards et deux hôtesses, mais aucune trace du capt'ain. J'envois un message sur WhatsApp pour demander si quelqu'un possède son numéro mais aucune réponse. Laissons lui 5 minutes avant d'appeler les opérations (ce n'est jamais sympathique dinclure ces gens là  si on a seulement quelques minutes de retard).

Le temps passe, toujours aucune trace du commandant de bord. Je parle avec le numéro 1 (responsable chez les PNC) puisquen l'absence de chef, c'est à  moi de mener la danse. Je leur donne le briefing sur les conditions météos, les temps de vols, des trucs confidentiels , mais aussi un point très important : nous ne pourrons pas commencer lembarquement avant que le refuel soit terminé. En effet, nous avons une procédure spécifique à  l'aéroport où je suis basé: pendant lembarquement/débarquement/passager à  bord, il n'est possible de faire le plein que si un pilote soit présent dans le cockpit pendant que l'autre se trouve à  lextérieur, connecté via un casque. Le calcul est vite fait, il m'est impossible d'être à  deux places en même temps.

Nous nous dirigeons vers la porte dembarquement et je rencontre le dispatcher. Je lui explique le problème et jinsiste bien que nous ne pouvons pas commencer lembarquement.

C'est à  moi douvrir la porte de l'avion, et lancer toute la préparation du cockpit, un téléphone à  loreille pour joindre les opérations. Impossible de joindre les responsables du personnel, alors je contacte un autre département en leur demandant de passer le message. Le cockpit pratiquement prêt, je descends faire la visite pré-vol et récupérer le reçu carburant.

Je recroise le dispatcher et lordonne de commencer lembarquement. Le but est simple: gagner du temps pour que lorsque le CAPT arrive, on puisse partir immédiatement. Nous sommes déjà  à  15 minutes de retard.

Jappelle une nouvelle fois, et tombe enfin sur les responsables du personnel: personne ne leur a passé de message. On recommence à  zéro !! Ils sont étonnés de l'absence du commandant et se dépêchent de trouver une solution. Je leur demande de me tenir au courant.

Lembarquement touche presque à  sa fin quand je reçois enfin des nouvelles: dans 15 minutes un autre CAPT sera présent. Nous sommes déjà  à  près de 30 minutes de retard.

Pendant ce temps, la température augmente dans la cabine et on me supplie dallumer l'APU. Nouveau problème: l'aéroport est très strict pour le bruit et il n'est possible dallumer l'APU que 5min avant le départ. Je dois demander l'air externe au dispatcher. Malheureusement, le système d'air ne fonctionne pas. Jécris une remarque dans le rapport et allume l'APU pour donner un peu d'air aux passagers.

Le CAPT arrive, sinstalle à  bord et à  moi de lui faire un rapide briefing. De l'informer de la quantité de carburant que j'ai choisie, de la météo et il est évident que c'est moi qui pilote sur cette première étape. Briefings, checklists, et voilà  en pushback avec 52 minutes de retard.

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En étant pro-actif, le retard est "minimisé". On pense souvent que le copilote est un rôle second'aire mais non seulement nous avons les mêmes qualifications que celui sur la place de gauche pour piloter l'avion (avec lexpérience en moins, certes), nous avons aussi un rôle extrêmement important dans des cas particuliers comme celui-ci. Nous devenons responsable à  bord, le chef dorchestre pour amener les passagers d'un point A à  un point B dans les temps promis. Nous prenons des décisions cruciales en nous assurant des respects des règles.



Au terme de cette journée c'est à  2h du matin que je suis rentré avec 1h30 de retard cumulée sur les 4 vols (malheureusement, une fois en retard, on perd notre heure de départ suivant, on doit attendre notre tour etc) et nous avons dépassé l'heure max autorisée de travail (cela s'appelle "capt'ain discretion" et permet détendre exceptionnellement le temps de travail). Mes vols du lendemain ont été transférés à  un autre copilote qui était en standby pour me donner mes heures de repos réglementaire.

Amic

Tim
 
Bonjour Tim :)
Merci pour ton récit dét'aillé très intéressant, démontrant toute limportance du copi comme de l'ensemble d'un équipage formé, qualifié, sachant faire preuve dinitiative toujours dans le souci de la SECURITE :)
 
Merci pour le récit, très instructif et aussi bien écrit
 
Donc en l'absence du Captain une fois que le plein a été fait tu lances lembarquement.
Sinon pour faire le refuel en même temps que lembarquement, il faut être deux!

Quest ce qui motive cette procédure spécifique?
 
très intéressant :rolleyes:
et du coup le capt'ain il était ou au final ?
 
C'est le charme du metier...quand ca sort de la routine hein?
Well done ... O:)
 
Merci pour vos messages :)

Donc en l'absence du Captain une fois que le plein a été fait tu lances lembarquement.
Sinon pour faire le refuel en même temps que lembarquement, il faut être deux!

Quest ce qui motive cette procédure spécifique?

La sécurité ! En fait, tout comme en voiture, faire le plein est une opération dangereuse. Il existe différentes règles à  respecter si lon souhaite le faire avec des passagers à  bord: les issues de secours dégagées, le témoins "attacher vos ceintures" éteint, il faut un fuel superviser qui soit connecté au casque, etc en cas d'une évacuation.

Ces règles dépendant aussi du pays dans lequel se trouve l'avion. Dans certains il suffit de mettre un casque, faire un check in et puis on peut aller faire la visite pré-vol, dans d'autres il faut impérativement rester connecté. Aussi, ce travail peut être délégué à  toute personne qualifié, par ex. un pilote de la compagnie qui voyage à  bord, ou toute personne formée pour faire ce boulot. Notre compagnie commence timidement à  engager du monde pour éviter aux pilotes de faire cette tâche qui ralenti la préparation (on est censé faire une rotation en 25 minutes) mais ils ne sont pas encore présent à  notre base.

et du coup le capt'ain il était ou au final ?

Aucune idée ! C'est un autre qui la remplacé, et l'autre na jamais donné signe de vie.

C'est le charme du metier...quand ca sort de la routine hein?

C'est vrai ;) nous sommes formés à  tellement de situations qui n'arrivent heureusement jamais que quand quelque chose sort de lordinateurn'aire ça fait plaisir de savoir qu'on peut le gérer.

Il n'y a pas de procédure "le capt'ain est en retard" mais avec du bon sens et du sang froid, show must go on !

Amic

Tim
 
Merci pour ce récit, c'étais captivant.
Belle démonstration dexpertise :)
 
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